Nuits d’été à Brooklyn, Colombe Schneck

Tristement d’actualité…

Tiens, tiens, une revenante. Je reprends ma plume comme si de rien n’était mais avec une légère appréhension : vais-je encore savoir vous parler littérature après ces longues semaines de silence ? A vous de me le dire…

Ce n’est pas la chaleur qui embrasa les rues de Crown Heights cet été-là, mais des années de tensions et de ressentiments entre les deux communautés qui y habitent. Afro-Américains et Juifs Loubavitch, noirs et blancs, se partagent les immeubles en briques de ce quartier de Brooklyn. Ils s’observent, se côtoient peu et s’ignorent la plupart du temps. Alors quand un enfant noir est percuté par un des véhicules du convoi du rabbin des Loubavitch, sa mort est vengée par des rugissements de colère « Mort aux Juifs », de la casse, des flammes et du sang – un étudiant juif fut assassiné-. Au milieu de ce chaos, Esther panse ses blessures amoureuses. Frederick, son amant, l’a brusquement quitté ; leurs différences seraient insurmontables. Lui, noir, américain, marié, père de famille avec une vie bien établie. Elle, française, juive, bourgeoise, ambitieuse et irradiant de jeunesse. Chargée de couvrir les émeutes de Crown Heights, Esther trouvera-t-elle dans ces événements les raisons de son échec amoureux ?

Si le titre – Nuits d’été à Brooklyn–  et la couverture aux accents Pop Art adoptent les codes de la comédie romantique et aigre-douce à la Woody Allen, la teneur du roman s’en éloigne radicalement. Colombe Schneck a bien imaginé une folle et impossible histoire d’amour autour du plus grand incident antisémite de l’histoire des États-Unis, mais ce qui reste à l’esprit une fois le livre refermé, c’est le goût amer du racisme, de l’incompréhension et du fatalisme. Pourquoi les hommes ne peuvent-ils pas s’aimer les uns les autres ? L’alternance de scènes entre passé et présent, déroutante de prime abord, permet en réalité d’ancrer les émeutes de Crown Heights dans la continuité de l’Histoire, l’héritage esclavagiste puis ségrégationniste des États-Unis et l’escalade de la persécution des Juifs au XXème siècle. Nuits d’été à Brooklyn réunit toutes les qualités d’un bon livre : instructif, poignant et percutant. Car, trente ans après ce drame, qui peut arguer que les choses ont changé ?

Avis de Gwenn Ha Lu : à lire pour la justesse du constat sur la fracture de la société américaine. Ce roman fait écho à l’actualité qui secoue les États-Unis,  la mort de George Floyd, un Afro-américain étouffé par un policier lors de son arrestation. Motif de l’interpellation : un présumé faux billet de vingt dollars… Durée de l’agonie de George Floyd, huit minutes…Nombre de signalements en interne sur les pratiques abusives du policier incriminé, dix-huit !

passionnant-critique-litteraire

TITRE : Nuits d'été à Brooklyn

AUTEUR : Colombe Schneck

ÉDITEUR : Stock 


NOMBRE DE PAGES : 304 pages 


 

DATE DE PARUTION : 26/02/2020

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